Les Contes du Vagabond
Recueil
Auteur : Claude Mamier
Editeur : Malpertuis
Collection : Brouillards
Année : 2008
Illustration de couverture : photographie de Claude Mamier
Photographies intérieures : Claude Mamier, Dul
Quatrième de couverture :
Une légende persane dit qu’un conteur est assis face à l’océan, et raconte tant d’histoires que l’océan fasciné oublie de se mettre en colère. Personne ne sait ce qui se passerait si cet homme venait à se taire, personne d’ailleurs ne sait qui il est ni d’où il vient. C’est juste le Vagabond, le porteur d’histoires qui elles-mêmes portent le monde, portent les mondes. Quand ses récits se passent de nos jours, dans les rues de Bangkok, de Paris ou de Bucarest, les contes d’autrefois ne sont jamais loin, et ramènent des parfums venus de la savane africaine ou de la jungle d’Amazonie. Tout se tient, car tout s’est toujours tenu, et la toile est tissée de mots. Asseyez-vous un instant, venez donc écouter les histoires : Vagabond est fatigué et il faut l’aider à porter les légendes. Si les contes étaient oubliés, si l’océan sortait de sa torpeur, combien de temps nous resterait-il ?
Auteur un jour, « criard » toujours
En 2003, Claude Mamier concluait la postface de son recueil Récits des Coins d’Ombre par l’annonce de son départ : en compagnie du photographe Dul, il se lançait dans l’aventure d’un tour du monde en 1000 jours, en quête d’images et de mots de tous pays. Revenu en 2006, devenu dans l’intervalle Claudio le Vagabond, il offre aujourd’hui au lecteur le fruit de ses voyages, de ces morceaux de vie recueillis sur une feuille de papier, de ces heures passées à écouter les histoires des autres.
Ces pages ne constituent cependant ni un recueil de contes traditionnels, ni une récolte recueillie d’histoires du monde entier. L’écrivain voyageur s’est inspiré des mille détails de ses parcours, pour donner jour à des contes modernes nourris de vieilles légendes et de fraîches douleurs. Ses personnages sont bien souvent, eux aussi, des errants, des voyageurs venus chercher l’apaisement de leur hantise, ou rattrapés par l’avènement d’une histoire dont le sens les dépasse. Car « les histoires sont forcément vraies. Ou alors elles l’ont été, ou le seront, à un autre moment, dans un autre endroit, un autre monde. »
Le tour des mondes en 7 nouvelles, et un conte de conteur
Setting : Liverpool, dans le pub du Tell Tale Heart. Lorsque l’étranger a proposé de payer son repas en racontant une histoire, Carlo a bien rigolé. Mais comme tout le monde, il a écouté, lui aussi, encore et encore, les récits de Vagabond…
Cambodge. De Phnom Penh à Bokor, une victime rescapée du régime khmer rouge tente d’exorciser les fantômes du passé, ou de les retrouver… A la lecture de cette impressionnante et douloureuse nouvelle, on se laisse envahir par le malaise qui imprègne êtres et lieux – oppressante impression que j’avais déjà éprouvée en visionnant un court-métrage sur le même thème, Devouring Buddah.
Istanbul. Pour fuir une vie toute tracée d’épouse et mère, Lisa a erré jusqu’en Turquie. Lorsqu’une vieille femme lui apprend spontanément l’art de la broderie traditionnelle, lorsqu’une jeune tatoueuse la prend par la main pour orner son bras d’un motif bien particulier, elle se révolte : quel destin tente-t-on encore de lui imposer ? Un récit onirique et touchant.
Bucarest. Il suffit d’une silhouette aperçue de nuit pour réveiller les souvenirs du vieil Anton, cauchemars de ce temps où, derrière les barbelés nazis, il regarda sa femme périr d’une mort sans rapport avec l’extermination voulue par le régime. A travers les horreurs du passé et les troubles du présent, un prédateur exhibe dans cet étrange récit l’ambiguïté de sa nature.
Tanzanie. Quel plaisir de voir renaître ce conte poétique, originellement publié dans l’anthologie Chimères (éditions de l’Oxymore, 2003). Une magnifique plongée au coeur de l’Afrique des légendes, en ces temps où les dieux décident du sort des mondes qu’ils ont créés.
Amazonie. Contées en triptyque, ces « Légendes de la Selva » nous donnent à vivre l’inquiétude des moments où les esprits de la jungle et du fleuve Amazone font irruption dans le monde des hommes, qui bascule alors dans l’étrangeté, le brouillard, l’onirique. Ces contes subtilement entrelacés rendent un bel hommage aux forces cachées de la nature sauvage.
Bangkok. La boutique d’un mystérieux tatoueur semble attirer d’elle-même tous ceux que le désir consume, et qui ignorent, ou dans leur fièvre ont oublié, qu’il y a toujours un prix à payer. Une nouvelle et puissante démonstration de la magie à l’oeuvre dans le tatouage…
Paris. La tonalité de ce récit m’a d’emblée surprise : ici, le voyage n’est plus géographique mais temporel, puisque nous explorons le Paris du futur. Plus précisément, un pan de ce Paris, le cimetière du Père-Lachaise, où les tombes des vieilles idoles du rock sont délaissées : la sépulture d’un prêtre sataniste bat tous les records de visiteurs, surtout en ce jour de résurrection annoncée… Dans le recueil, ce récit peut sembler à part, mais Claude Mamier y a finalement exploité avec talent les légendes propres à notre imaginaire horrifique.
Retour à Liverpool. Séduit et rebelle à cette séduction, Carlo écoute, encore et toujours, les histoires de Vagabond. Entendra-t-il également le choix qui lui est offert ?
Un bel hommage au conte
A travers ce superbe recueil, Claude Mamier relate ainsi un double périple, son exploration vagabonde des contrées lointaines, et son voyage intérieur au coeur des hantises de l’homme. Ces « coins d’ombre », ainsi qu’il les avait déjà nommés, se trouvent artistement exposés à la lueur diffuse des contes et légendes recueillis par l’auteur, pour le plaisir du lecteur émerveillé, transporté hors de ses repères vers des places légendaires qui toutes ont donné naissance et refuge à un bout d’imaginaire.
Les touristes aiment ramener de leurs voyages toutes sortes de « souvenirs », babioles à exhiber et souvent impuissantes à dire la vérité des pays visités. Claude Mamier, lui, en a donc ramené une splendide collection de mots, de contes, de paroles de sagesse et de mystère. En les partageant avec nous, tels qu’il les a entendus ou intégrés à ses propres histoires, il leur rend un hommage aussi splendide que modeste, le tribut d’un homme qui se sait humble maillon d’une chaîne de conteurs.
A notre tour, nous voilà donc enrichis par les dons de Vagabond. Parvenus au terme du recueil /du voyage/, on se surprend à tendre l’oreille, à guetter l’écho des paroles qui nous ont charmés – avant de se lever, et de marcher vers ses propres histoires.
Le Fil d’Ariane :
- Le site de l’association « Les 1000 jours des 1001 nuits« , qui abrite toutes sortes de richesses : présentation des deux voyageurs-conteurs Claudio et Dul, interviews, carte de leur parcours et carnets de routes, contes et portraits de conteurs, nouvelles et photographies… Passionnant à explorer !
- « Des images se racontent« , l’album photo/expo que Dul a consacré à ce tour du monde
- Le site du griot et joueur de Kora Ablaye Cissoko, qu’évoque Claude Mamier dans sa postface
Cartographie :
Préface de Patrick Eris
Vagabond (partie 1) – Bokor Palace – J’écris ton nom avec des ailes de papillon – Flammes de nos corps – Les cendres du monde – Légendes de la Selva – L’image de mes désirs – Je reviens – Vagabond (partie 2)
Du Criard et du Griot (la postface de Claudio) – Ceux qui sont partis (la postface de Dul)
Bonjour,
Je voulais vous remercier pour cette critique fort sympathique : c’est toujours rassurant, quand on sort un nouveau livre, de tomber pour la première critique sur quelqu’un qui semble avoir passé un bon moment. Je préciserai juste que la nouvelle parisienne se déroule au cimetière du Père-Lachaise, et pas au Montparnasse, même si ce dernier est également un endroit très intéressant et trop souvent négligé par les visiteurs.
A bientôt,
Claudio
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Bonjour,
Désolée pour cette erreur (d’autant que dans mon esprit il était clair qu’il s’agissait bien du Père Lachaise), je corrige cela de suite !
Et merci à vous, surtout, pour ces contes, et le plaisir ressenti à parcourir votre recueil…
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[…] La critique des Contes du vagabond par PsychéNote personnelle: (2 votes, moyenne : 5,00 sur 5)Seuls les Lunemauviens identifiés peuvent voter ! Loading … […]
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